Les progrès réalisés en chimie d’extraction et d’analyse permettent alors d’isoler et d’identifier les principes actifs, c’est à dire les molécules responsables des propriétés thérapeutiques de ces remèdes. Ainsi en 1825, M.Fontana, un pharmacien Italien isole le principe actif du saule blanc et le nomme salicine. En 1829, un pharmacien de Vitry le François, Pierre Joseph Leroux fait bouillir de la poudre d'écorce de saule de l'eau et concentre sa préparation. Il obtient des cristaux blancs qu'il baptise salicyline (Salix = Saule). Puis des scientifiques allemands purifient cette substance active, d'abord appelée Salicyline puis acide salicylique. D'autres sources naturelles sont trouvées comme la reine-des-prés.
L’acide salicylique, ancêtre direct de l’aspirine, est le premier médicament dont les chimistes aient réalisé la synthèse. Sa mise sur le marché rendit possible toutes sortes d’autres essais. Dés 1875, deux médecins allemands montraient qu’il agissait favorablement sur les fièvres rhumatismales. Cependant malgré leur efficacité reconnue, l’acide salicylique et son sel de sodium présentaient de nombreux inconvénients. L’acidité du premier provoque sur le parcours digestif une irritation très gênante et le second possède une écœurante saveur douceâtre, difficilement supportable dans un traitement prolongé. C'est Félix Hoffmann, chimiste allemand entré au service des laboratoires Bayer en 1894, qui, en 1897, reprenant les travaux antérieurs de Gerhardt un chimiste strasbourgeois qui avait dans le passé expérimenté la synthèse de l’acide acétylsalicylique mais dont les travaux sont tombé dans l’oubli, trouve le moyen d'obtenir de l'acide acétylsalicylique pur et réalise sa production industrielle. Il faut dire que son père souffrait d'un rhumatisme chronique et que l’acide salicylique le soulageait, mais son estomac en tolérait mal l’acidité, il eut donc l’idée de synthétiser un acide salicylique dont l’une des parties supposées agressives aurait été provisoirement neutralisés. Simultanément, d’autres membres de la firme mettaient en évidence les propriétés analgésiques du nouveau médicament. Finalement le 1er Février 1899, Bayer déposa en Allemagne, à défaut de brevet, la marque Aspirine. Le A initial n’est autre que celui d’acétyl, tandis que la terminaison spirine rappelait spiraea ulmaria (ou reine des près). Ce n’est que bien plus tard, en 1955, que l’on constata que l’aspirine allongeait le temps de saignement et qu’on la préconisa dans la prévention des thromboses, en 1967, on découvrit son action inhibitrice sur l’agrégation plaquettaire.
2) Propriétés pharmacologiques.a) Mécanisme d’action.L'aspirine possède plusieurs propriétés. C’est un analgésique, un antipyrétique, un anti-inflammatoire et un antiagrégant plaquettaire.Les mécanismes d'action de l'aspirine sont restés longtemps ignorés du fait même de la multiplicité apparente de ses foyers d'action. En 1971, John R. Vane, lors de recherches qui lui valurent le prix Nobel de médecine en 1982, découvrit que l'aspirine inhibe la production de prostaglandines et de thromboxanes. L'aspirine régularise le dysfonctionnement de la sécrétion des prostaglandines dont les propriétés ont pour conséquences secondaires de donner de la fièvre, d'être inflammatoires et d'exacerber la douleur ou de rendre sensibles les territoires soumis à leur action. L'aspirine fait baisser la fièvre (antipyrétique), en réduisant la production de prostaglandines dans l'hypothalamus, thermostat de la température corporelle. Elle réduit la douleur (analgésique) en bloquant la production des hormones responsables des messages transmis aux récepteurs de la douleur dans le cerveau, d'où son efficacité sur les migraines et les douleurs d'origines diverses. Par le même mode d'action, elle réduit les inflammations (Anti-inflammatoire) résultant d'une dilatation vasculaire. L'aspirine agit sur les plaquettes sanguines, en inhibant la cyclo-oxygénase, une enzyme ayant un rôle important dans l'agrégation des plaquettes, et ce, de manière permanente, c'est à dire durant toute la durée de vie de la plaquette (entre 7 et 15 jours). Il favorise par ce biais la circulation et peut servir pour prévenir les attaques cardiaques, en évitant la formation de caillots (thrombose). b) Pharmacocinétique.L’aspirine est diffusée très rapidement dans l’ensemble de l’organisme, les molécules d’aspirine sont d’abord absorbées par la muqueuse gastrique et la paroi intestinale, passent par le sang et transitant toujours par le foie avant d’être redistribuées dans l’organisme tout entier, elles sont ensuite filtrées par les reins puis éliminées par les urines. La rapidité de la distribution du produit dans l’organisme est l’une des clés de son efficacité. Le pic de concentration est atteint dès la première demi-heure. Sa demi- vie dans le sang n’est que de 15 à 20 minutes.
L’élimination de l’aspirine est plus ou moins rapide, selon les doses absorbées. Chez l’adulte, à partir d’une dose supérieure à 4grammes par 24 heures. Une faible augmentation de cette dose entraîne une très forte élévation de la concentration sanguine et un risque rapide d’accident par effets secondaires. Cette caractéristique souligne la gravité des surdosages. ![]() 3) Indications thérapeutiques et préventions.• Douleur, fièvre et inflammation.L'aspirine est utilisée depuis plus de cent ans pour soulager la douleur, faire baisser la fièvre et traiter l'inflammation. • Maladies cardio-respiratoires. À petite dose (entre 75 et 300 mg/j), les propriétés antiagrégantes de l'aspirine préviennent efficacement la formation de caillots de sang dans les vaisseaux sans causer de dommages significatifs à l'organisme. Le bénéfice de cette prise a été prouvé en prévention secondaire, c’est à dire, après un premier accident vasculaire. • Réduction du risque de cancer. Des études sur les effets à long terme de petites doses d'aspirine montrent qu'elles auraient un effet contre certains types de cancers, comme ceux du colon, sein, prostate, bouche, gorge, œsophage, estomac. Selon une étude, la prise régulière de deux comprimés par semaine, dosés à 325 mg, sur plus de dix ans, réduirait le risque d'apparition de cancer du colon. Cependant les doses indiquées sont susceptibles de provoquer des saignements gastriques ou intestinaux. Cette étude épidémiologique a été confirmée par des études expérimentales, très probantes, chez des volontaires et chez des rongeurs. Au moins 4 essais cliniques montrent que de petites doses d'aspirine diminuent, modestement, la récurrence des polypes intestinaux. Une vingtaine d'études de cancérogenèse chez rats et souris étayent cet effet protecteur. • Fécondation. Selon une étude, la prise d'aspirine à 75 mg/j augmenterait l'efficacité de la fécondation in vitro en améliorant la vascularisation de l'utérus. ![]() 4) Contre – indications et précautions.L’aspirine présente des effets secondaires, qui sont des troubles gastriques ou des acouphènes.Elle est déconseillée aux nourrissons et aux enfants, car en cas de surdosage, elle est neurotoxique. En outre, elle peut entraîner l’apparition du syndrome de Reye en cas de varicelle ou de grippe. Les personnes cardiaques, sous traitement à petites doses pendant une longue durée en raison de son effet antiagrégant, peuvent être exposées à ces effets secondaires. Cependant, sa prescription est justifiée par le fait que le bénéfice du traitement reste de loin supérieur au risque. Chez les personnes souffrant d’un ulcère à l’estomac, l’aspirine peut occasionner des hémorragies. Lors d’une grossesse, l’aspirine peut être pris à titre ponctuel pendant les deux premiers trimestres, ensuite l’utilisation d’aspirine est contre-indiquée. A partir du sixième mois, ce type de médicament exerce sur le foetus des effets vasoconstricteurs au niveau des reins et peut conduire à une insuffisance rénale ou encore à des troubles de l’appareil cardio-pulmonaire. Ce médicament est également contre –indiqué au cours de l’allaitement, la molécule passant dans le lait. En cas de risque de dengue, l’utilisation de médicaments à base d’aspirine est fortement désapprouvée vu le risque d’apparition de la forme hémorragique de la maladie. De manière générale, l’aspirine fluidifie le sang. Par conséquent, le risque d’hémorragie est à prendre en compte. |